«On est dans un pays qui se fait dépouiller de ses terres. C’est la ruée : même l’Afrique du Sud se met à faire des OPA. Le principe est simple : soit vous passez par le gouvernement, friable, soit vous vous appuyez sur les chefs coutumiers qui délivrent des certificats. On est court-circuités. Avec le Forum des amis de la terre, un collectif d’associations paysannes, on mène un travail de plaidoyer et de lobbying pour la sécurisation foncière des petits producteurs. On a même bossé sur le nouveau code agricole.
«Mais la corruption est galopante. Et la justice impuissante : 80% des plaintes portées devant les tribunaux sont des litiges fonciers. Et puis, il y a les multinationales. La France peut bien dire qu'elle lutte contre la spéculation mondiale, mais que fait-elle contre ses propres entreprises, qu'elle devrait moraliser ? Je suis venu à Paris en mars 2010, chez Bolloré, qui venait d'avoir un permis pour exploiter des mines dans le Nord-Kivu, à Manguredjipa, dans le territoire du Lubero. Je leur ai dit : "Vous ne pouvez pas acheter des terres et couper des villages avec des barbelés." Une responsable m'a répondu, en agitant des papiers tirés du code forestier : "Mais on a un accord avec le gouvernement !" Quant à la FAO, l'agence de l'ONU, elle vient de verser 2 millions de dollars [1,4 million d'euros, ndlr] pour l'intensification de l'aide agricole. Et bien, 1,6 million sont restés à Rome, pour l'expertise ; 280 000 ont filé pour l'administr