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Interview

«L’ISF est considéré par les Français comme un impôt haïssable» «C’est du bricolage sans cohérence d’ensemble et une folie idéologique»

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Thomas Piketty, économiste, et Gilles Carrez, rapporteur UMP du budget à l’Assemblée, s’affrontent sur la réforme de la fiscalité.
publié le 12 mai 2011 à 0h00

Fin du très décrié bouclier fiscal qui limitait les impôts à 50% des revenus déclarés, baisse massive de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF), le tout compensé par de nouvelles taxes. C'est le projet de réforme de la fiscalité du patrimoine, «à rendement constant», dixit le gouvernement, soumis hier au Conseil des ministres. Un jeu à somme - presque - nulle pour les Français les plus fortunés, mais qui devrait rapporter plusieurs centaines de millions d'euros aux 592 000 redevables de l'ISF. Gilles Carrez, rapporteur UMP du budget à l'Assemblée nationale, et Thomas Piketty, économiste spécialiste des questions fiscales, ont échangé leurs arguments.

Quelle était l’urgence à alléger l’ISF ?

Gilles Carrez : Tous les pays qui avaient un ISF, comme la Suède, l'Espagne ou l'Allemagne, l'ont considéré comme injuste et ont fini par le supprimer. En France, la moitié des 592 000 assujettis à cet impôt sont dans la première tranche et l'acquittent en raison de l'envolée des prix de l'immobilier. Ces gens ne supportent pas d'avoir à payer un impôt, en plus de la taxe foncière, pour une résidence principale qui ne leur rapporte rien. Quant aux 1 700 détenteurs des patrimoines les plus élevés (plus de 16,5 millions d'euros), ils considèrent que cet impôt est confiscatoire, dans la mesure où ils se voient prélever 1,8% sur des avoirs qui ne leur rapportent que 3,5 à 4% par an. Dès lors qu'ils ne peuvent pas payer, expliquent-ils, ils sont contraints de s'exiler. Rocard lui-même, lorsqu'il a rétabli