Jean-Paul Fitoussi est président de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE).
On la croyait en partie absorbée, mais la crise n’est-elle pas devant nous ?
Le problème, c’est qu’elle a changé de nature tout en continuant. Après avoir sauvé les marchés, les Etats n’ont imposé aucune contrepartie au système bancaire et financier. Les dettes publiques ont explosé ; aucun pays n’a retrouvé les niveaux de croissance d’avant crise. On se retrouve, au mieux, dans une situation, de perte de croissance pendant cinq ans.
Une double récession est-elle plausible ?
On est revenu trois ans en arrière, après la faillite de Lehman Brothers, en septembre 2008. Avec une perspective très inquiétante. La mobilisation politique avait alors contribué à sauver le système financier et l’économie mondiale. Aujourd’hui, leur atermoiement et leur raisonnement obscur et complexe alimentent la crise.
Vous mettez sur le même plan le compromis américain et le plan de sauvetage européen ?
Non. La crise de la dette publique américaine est avant tout une bataille politique, entre la droite dure, qui veut réduire les dépenses publiques, et le centre gauche, qui veut augmenter les impôts. A l’arrivée, on a choisi. Faire payer la classe moyenne : baisser les dépenses publiques, c’est de facto augmenter les impôts sur la fraction la plus importante de la population, qui ne pourra plus consommer et relancer la croissance… La zone euro a en revanche une responsabilité fondamentale dans la rechute actuelle. Les chefs d’Etat et de gouvernement se sont félicités, le 21 juillet, du deuxième plan de sauvetage de la Grèce, mais personne n’a vraiment compris les modalités de décision, ce qu’elle impliquait e