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Libération
TRIBUNE

Exigeons un moratoire et un audit sur la dette

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par Razmig Keucheyan, maître de conférence en sociologie à Paris-IV
publié le 29 août 2011 à 0h00

Les demi-mesures successives bricolées par les gouvernements européens ne viendront de toute évidence pas à bout des délires d’un capital financier en déroute. La mise au centre d’un débat démocratique sur les conditions de contraction de la dette permettrait de déclarer l’illégitimité d’une partie de celle-ci et ouvrirait la voie à sa répudiation. Déclinés dans tous les pays de l’UE, un moratoire et un audit sur la dette publique permettraient aussi aux peuples de commencer enfin à faire l’Europe : par un acte souverain affirmant la subordination de l’économie à la politique et la primauté des besoins sociaux face à la rente financière.

En se déplaçant de la finance privée à la dette publique, la crise a changé de nature. De financière, économique et sociale, elle est devenue politique. Les gouvernements sont désormais en première ligne, non comme par le passé pour réguler sur un mode keynésien les soubresauts de l'accumulation du capital, mais pour endosser l'agenda prédateur d'un capitalisme aux abois. On assiste à l'émergence d'un véritable «gouvernement par la dette». Son remboursement a cessé d'être un problème de politique publique particulier pour se transformer en rapport social général auquel tout est subordonné. La culpabilisation est le principal ressort de ce mode de gouvernement. L'économiste Charles Wyplosz, membre de la commission Camdessus sur les déficits publics, appelle le pays à faire son «mea-culpa national» afin d'expier le péché de l'endetteme