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Libération
Enquête

Dénuement durable

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La crise frappe partout aux Etats-Unis, même au soleil. En Floride, les riches ont toujours leurs bateaux. Mais la classe moyenne s’enfonce dans la misère. Epicerie d’entraide, camp de tentes… La vie s’organise autour de ces nouveaux pauvres.
publié le 15 octobre 2011 à 0h00

Sa vie entière tient sur une table. Un grille-pain cabossé, qui ne lui appartient pas. Des boîtes de conserves qu'il récupère deux fois par semaine dans une église organisant des distributions de nourriture. Une vieille cocotte-minute aussi et des casseroles, qui lui servent à réchauffer ses plats. A 52 ans, Marc Luce n'a plus rien et il a du mal à trouver les mots pour le dire. Avant même d'ouvrir la porte de la pièce minuscule qui lui sert de logement depuis mai, au rez-de-chaussée d'une maison décrépie dans l'est de Sarasota (Floride), il s'excuse de «tout cela», sans trop savoir quoi ajouter. «C'est difficile d'en arriver là, lâche-t-il dans un souffle de voix, quelquefois, je ne réalise toujours pas.»

Il y a encore trois ans, Marc Luce était analyste dans une société d'informatique. Un salaire confortable, une femme, des enfants : le «rêve américain dans toute sa splendeur», comme il dit, dans une ville de l'ouest de la Floride où il fait bon vivre. Et puis il a été licencié avec la crise. «Ça a été la descente aux enfers. Tout s'est effondré. J'ai divorcé, j'ai tout perdu. J'ai résisté quelques mois mais je n'ai rien pu faire. En plus, j'avais des problèmes de diabète et des frais médicaux exorbitants. L'an dernier, en décembre, je me suis retrouvé à la rue, à dormir caché dans les parcs et les forêts. Aujourd'hui, on me prête cet endroit, mais je ne sais pas combien de temps ça va durer. Je ne sais plus où j'en suis. Jamais, je n