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Libération
TRIBUNE

L’Europe a inventé la démocratie, reste à penser la démocratie européenne

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par Vincent Peillon, Philosophe et député européen (PS)
publié le 14 novembre 2011 à 0h00

La démocratie est un bien précieux ; c'est aussi un bien fragile. Le continent européen devrait pouvoir s'en souvenir lui qui, pour l'avoir inventée à Athènes il y a plus de deux mille ans, a connu au long du XXe siècle les tragédies de la Grande Guerre, des totalitarismes, l'Holocauste, le goulag, mais aussi Franco en Espagne, Salazar au Portugal, les colonels en Grèce. Certains ont pu croire qu'il suffirait, pour que la démocratie triomphât définitivement de ses ennemis, d'exercer le vote, et de l'exercer de la manière la plus directe qui soit.

On sait, depuis Napoléon «le Petit», qu'il s'agissait là d'une facilité de pensée. Le suffrage universel, pour être la condition nécessaire de la démocratie, n'en est pas la condition suffisante et peut même se faire «instrument d'oppression» comme disait autrefois le philosophe républicain Etienne Vacherot. Non, la démocratie requiert bien plus : un espace public, un esprit public, des valeurs, une organisation, une séparation et un contrôle des pouvoirs, une éducation, des Lumières, des solidarités économiques et sociales, une justice.

La crise de l’Europe que nous vivons est une crise économique, mais elle est tout autant et d’abord une crise du politique et de la démocratie. La palinodie du vrai-faux référendum grec aura eu à cet égard valeur de double révélateur : celui de la nécessité d’un retour puissant du politique, mais aussi celui du sentiment troublant de son impossibilité, de son incongruité. Cette amb