Longtemps, l’alcool ne fut que bouteille impavide, nom sans visage, marque désincarnée. L’ivresse n’avait pas besoin de s’humaniser pour être socialement acceptée. Depuis qu’Apollon et Gaïa ont remis au pas ce pochetron de Dionysos à l’hédonisme sans cervelle, la logique naturaliste qui triomphe se doit d’afficher une biographie enracinée, habillée de velours côtelé et chaussée de godillots en Gore-Tex respirant.
Effet Mondovino oblige, le vin s’est mis à friser les moustaches de ses hommes de l’art, nouvelles enseignes d’une publicité personnalisée. Il ne s’agit plus de lamper les douves du château, mais de boire le sang du copain.
Côté champagne, c’est plus compliqué. Les petites propriétés livrent souvent leurs raisins aux grandes maisons de négoce qui dominent la scène mondiale et cotisent aux bénéfices des caïds du luxe. Les récoltants-manipulants aux ongles noircis peinent à faire de l’ombre aux ingénieurs en blouse blanche qui assemblent, élaborent, conçoivent, au cœur des chais rutilants. A Reims, c’est aux chefs de cave à qui l’on fabrique désormais un vécu et une aura. Démonstration par l’exemple avec Didier Mariotti, homme-orchestre et façonneur des bulles de la maison Mumm, possession du groupe Pernod Ricard et important acteur du secteur, derrière Moët et Veuve Clicquot.
1, 87 m pour 92 kilos. L’homme a un physique qui s’impose, des épaules charpentées comme des solives, des mains à battre le linge, à baratter le beurre. Il y a bien le costume cravate de fonction q