Franck Dedieu et Benjamin Masse-Stamberger sont respectivement journalistes économiques à l'Expansion et à l'Express. Avec leur confrère du Monde Adrien de Tricornot, ils font paraître aujourd'hui Inévitable Protectionnisme (éd. Le Débat, Gallimard), où ils appellent à l'introduction d'un protectionnisme européen «positif et dédramatisé».
Comment en êtes-vous arrivés à la conclusion que le protectionnisme est inéluctable ?
Benjamin Masse-Stamberger : Ce qui nous a frappés, c'est la manière dont on a longtemps réussi à maquiller, avec la finance, le dépérissement de la production et de la croissance dans nos pays. Les Anglo-Saxons l'ont masqué via l'endettement privé de leurs ménages pour qu'ils continuent à consommer, les Européens du Sud en ayant recours à l'endettement public pour pallier les défaillances du secteur privé. Avec la crise, les masques sont tombés. On a pris conscience que le rétablissement durable de la croissance n'était plus possible sans un réinvestissement dans la production. Or, c'est impossible si l'on ne rétablit pas des conditions de concurrence loyale, à la fois sur le plan social, environnemental, fiscal et monétaire.
Par quoi faut-il commencer ?
Franck Dedieu : Par la mise en place de barrières douanières à l'échelle européenne, avec indexation du droit de douane sur le différentiel d'augmentation de la productivité et des salaires.
Concrètement ?
F.D. : Dans les pays émergents, la productivité a augmenté deux à trois fois plus vite que les salaires ces vingt dernières années, alors