Le petit monde du lait de brebis est en train de déborder. Des flots de lait déversés à l’aéroport de Biarritz, des milliers de litres jetés devant la chambre d’agriculture de Pau, les membres de la Coopérative laitière du Pays basque (CLPB) sont en rogne. Les industriels du fromage refusent de collecter leur lait d’appellation d’origine de production (AOP) et leur préfèrent un lait moins cher. Les voilà avec 1,5 million de litres dans les citernes.
Chantage. C'est une histoire complexe et illogique, qui mêle raisons économiques et inimitiés historiques. Pour fabriquer leurs fromages de brebis, les groupes agro-alimentaires (Andros, Bongrain, Lactalis…) ont besoin de 65 millions de litres de lait par an. Dans le bassin de l'Ossau-Iraty (la quasi-totalité du département des Pyrénées-Atlantiques et trois communes du département des Hautes-Pyrénées), 1 733 éleveurs produisent 57 à 58 millions de litres de lait, dont 40 millions certifiés AOP Ossau-Iraty. Seul le lait AOP permet de fabriquer un fromage AOC. Celui-ci se fait de décembre à juillet ; le reste du temps, les brebis sont taries avant de mettre bas et d'allaiter. Les industriels doivent importer d'Espagne (ou des départements limitrophes) le différentiel, soit entre 7 et 8 millions de litres.
Sublime paradoxe : les industriels ont des besoins supérieurs à la capacité de production du bassin, ils importent du lait, tandis que des éleveurs du coin se retrouvent avec 1,5 million de litres sur les bras. D'ap