Directeur du think tank européen Bruegel, Jean Pisani-Ferry (1) déplore l’absence d’une politique volontariste pour réduire les écarts entre les différents pays.
Tant le Fonds monétaire international (FMI) que les agences de notation conseillent à l’Europe de modérer sa politique d’austérité pour ne pas aggraver la récession. Cette mise en garde sera-t-elle entendue ?
Non, parce que ce qui domine aujourd’hui dans la stratégie européenne, c’est l’idée que la croissance viendra de la mise en œuvre de réformes structurelles visant à améliorer la compétitivité. Pour l’Allemagne, la crise et l’austérité sont vues comme les seuls moyens de forcer les pays du Sud à accomplir des réformes qui n’ont pas été faites. Si cette stratégie fonctionne, on va donc assister, sur le marché du travail, sur la fiscalité, sur les marchés des produits, à une concurrence en matière de réformes de compétitivité. L’économie française est déjà confrontée à la surcompétitivité des pays du Nord, elle risque bientôt d’être exposée au redressement des pays du Sud.
La politique monétaire peut-elle soutenir la croissance ?
La Banque centrale européenne [BCE] a consenti un effort très important, fin 2011, en fournissant près de 500 milliards d'euros de liquidités aux banques. Cela afin de contrer l'assèchement des crédits qui se profilait. Reste à voir, dans un contexte récessif, quelle va être la ligne de Mario Draghi [le président de la BCE, ndlr], par rapport à celle de la Réserve fédérale américaine, qui vient d'annoncer des taux au voisinage de zéro jusqu'à la fin 2014. Si la BCE [dont le taux d'intérêt se situe aujourd'hui à 1%] mène une politique expansionniste, il faudra accepter que l'inflation monte jusqu'à 3% en Europe du Nord, tandis qu'elle