L’économiste et anthropologue Paul Jorion a travaillé dans la finance aux Etats-Unis jusqu’en 2007.
Le scandale du Libor, c’était en 2007-2008 et dans la quasi-indifférence. Aujourd’hui, l’indignation est totale. Pourquoi ?
C’est une situation spécifique à la Grande-Bretagne. C’est là qu’est apparu un contexte qui a permis à l’opinion publique d’avoir le sentiment que les raisons de la crise étaient identifiées. Et soudain, au moment où l’on fait savoir publiquement qu’une banque du pays, la Barclays, a triché et qu’elle doit pour cela payer une amende d’un montant considérable, la maîtrise de la réaction que manifeste la population échappe à ceux qui ont mis en scène cette condamnation. Les metteurs en scène, régulateurs et gouvernants, pensaient qu’une condamnation suffirait pour que le scandale passe comme une lettre à la poste. En vain. C’est l’écœurement. Le gouverneur de la banque d’Angleterre et le régulateur en chef sont obligés de reconnaître que la réaction de l’homme de la rue dépasse ce qu’ils avaient prévu.
Pourquoi une telle réaction ?
Parce qu'il existe depuis un an un climat délétère. En juillet 2011, les Britanniques découvraient que la compagnie News Corporation de Rupert Murdoch avait pris un ascendant extraordinaire à tous les niveaux outre-Manche. On ne parle pas ici simplement de l'influence d'un groupe de presse sur la politique d'un gouvernement, mais de la manière dont cette compagnie avait perverti la démocratie. News of the World, de Murdoch, avait piraté les téléphones de plus de 4 000 personnes en Angleterre. Et quand des plaintes étaient déposées, elles n'aboutissaient jamais… Murdoch corr