L’Union européenne est comme un rêve étrange que nous avons fait ; il s’agissait de façonner et de ciseler un ensemble de valeurs politiques pour l’insérer dans un système complexe qui devait placer les valeurs humaines, la richesse culturelle et l’idée d’égalité au centre même de nos préoccupations. Il s’avère que l’Union européenne, en tant que système, pouvait résister à tout sauf à une crise. Quand a commencé la guerre en ex-Yougoslavie, nous avons regardé passivement les pays revenir à leurs alliances du début du siècle.
A présent, sous la pression d’une crise financière, les pays n’ont plus qu’une seule certitude : que leurs propres frontières et leurs propres intérêts comptent davantage que le bien collectif. Le sens commun s’est orienté vers les vieilles monnaies et les barrières commerciales. Sous la pression, nos loyautés vont aux Etats-nations, alors même que nos banques fonctionnent selon un nouvel agencement mondial. L’argent circule libre comme l’air, poussé ça et là par le vent, dérégulé, instable, incertain. Ce sont les idées qui sont restées verrouillées. Et, avec les idées, les identités.
Il importe de se rappeler la signification du rêve. Il importe maintenant, à la périphérie de l’Europe où je vis, de recommencer à employer le langage de l’idéalisme politique et culturel, de reconsidérer le langage qui a été déraciné par nos maîtres politiques pour voir si certains (ou incertains) mots ou concepts signifient quelque chose, ne serait-ce que nous offrir le ré