«Comment se fait-il que votre banque ait pu, en un bref laps de temps, déclarer des gains de 300 millions d'euros, puis reconnaître des pertes de l'ordre de 3,7 milliards ?» demande un député outré. «Cette différence s'explique par un changement des critères comptables», répond, impavide, Rodrigo Rato, ex-directeur du FMI et président de la quatrième banque espagnole, Bankia, dont il a dû démissionner en mai. Le député et le parterre de parlementaires qui l'entourent restent interloqués. L'élégant et flegmatique Rato n'expliquera pas davantage l'édifiant «trou financier». Durant près d'une heure, il répétera à l'envi : «Nous avons agi de manière adéquate… Les coupables ne sont pas les gestionnaires, mais la volatilité des marchés.»
Hier matin, la Chambre basse était le théâtre d'un tumulte médiatique : pour la première fois, des banquiers étaient auditionnés par des parlementaires. En l'occurrence, trois patrons démissionnaires des principales caisses d'épargne, dont les risques de banqueroute ont forcé la nationalisation. Le «grand oral» de Rodrigo Rato était le plus attendu. Et pour cause : «Gourou» des finances sous l'ère Aznar, il est aujourd'hui au cœur du fiasco bancaire espagnol - essentiellement dû à son excessive exposition à un secteur immobilier qui s'est effondré -, qui effraie les marchés financiers et explique l'extrême difficulté du pays à se financer.
Bankia, qu’il dirigeait depuis 2010, fusion de deux puissantes cai