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Libération
Interview

«Je vais partir ailleurs, loin, seul»

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La crise et ses dégâtsdossier
Espagne. Les Calle à Madrid
Cesar veut vendre son bazar à tout prix. (Photo Pierre-Yves Marzin. Riva press)
publié le 17 octobre 2012 à 22h43

«Liquidation totale pour cause de désespoir. Merci aux puissants de nous faire sentir libres, parce que nous sommes à poil !» Cesar Calle, 54 ans, a posé cette banderole au-dessus de Té con Limon (thé au citron), le commerce qu'il gère depuis quinze ans. Un vaste bazar du quartier madrilène de Prosperidad, où l'on trouve de tout, des fleurs artificielles aux posters de Tintin - l'essentiel étant made in Asia. Adolescent, Cesar rêvait de cette boutique. Un rêve partagé avec Alicia, son amour de jeunesse, qui est toujours sa compagne et qui, comme lui, du lundi au samedi, brûle douze heures par jour sous les néons de la boutique. Aujourd'hui, Cesar n'espère qu'une chose : vendre à tout prix son affaire. Depuis le début de la crise, en 2008, il n'enregistre que des pertes. Et parvient à peine à payer ses fournisseurs, alors que ses banquiers «lui rendent la vie impossible».

Il y a quinze ans, l'achat de ce bazar est pour Cesar un moyen de s'émanciper. Jusqu'alors, il travaillait avec sa mère et ses frères dans un négoce de textile. «Un business familial qui s'est mal terminé, chacun est parti de son côté. Moi, je voulais voler de mes propres ailes.» Té con Limon, bien implanté dans le quartier, a du succès. Mais la crise oblige Cesar à le transformer en affaire familiale ; ce qu'il voulait éviter. Ses fils, Pablo et David, dans l'impasse après leurs études - à l'image d'une génération aussi surdiplômée que désœuvrée (52,9% de chômage chez les