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Interview

«La RTT n’a pas, comme on continue à l’entendre partout, dégradé la valeur travail»

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La sociologue Dominique Méda a amplement étudié l’apport des 35 heures dans la société française.
publié le 30 octobre 2012 à 22h26

Professeure de sociologie à l’université Paris-Dauphine, titulaire de la chaire Reconversion écologique, travail, emploi et politiques sociales, Dominique Méda estime que la réduction du temps de travail reste une solution valable contre le chômage. Et le moyen de repenser notre modèle de développement et notre rapport au travail.

Les 35 heures sont largement critiquées mais qu’en pensent réellement les Français ?

Les enquêtes ont toujours montré que les Français ont largement apprécié la réduction du temps de travail (RTT), notamment lorsque celle-ci s’est opérée sous l’empire de la loi Aubry 1, c’est-à-dire avec une vraie réduction du temps travaillé et des créations d’emploi en contrepartie . Les plus satisfaits sont les femmes travaillant à temps plein car elles ont obtenu un desserrement des contraintes temporelles qui pesaient sur elles. Le temps libéré a principalement été consacré à la famille. Les hommes en ont également profité pour s’occuper davantage de leurs enfants. Menée à son terme, la RTT aurait pu constituer un puissant instrument au service de l’égalité professionnelle. Les insatisfactions viennent plutôt de la seconde loi Aubry (2000), qui a entraîné intensification du travail, faible création d’emploi, et flexibilité.

Les 35 heures auraient profité aux cadres, mais moins aux classes populaires…

C’est faux. Dans l’étude menée par le ministère du Travail sous ma coresponsabilité et consacrée à la manière dont les Français ont utilisé ces 35 heures, nous avons montré que les personnes qui en avaient le moins profité étaient les femmes peu qualifiées sans enfant, mais que les hommes, qu’ils soient cadres ou peu qualifié