Docteur en économie du développement, Marc Giget estime qu’innovation et crise sont intimement liées. Au point que l’une entraîne l’autre, et vice-versa.
Qu’est-ce qu’innover ?
C’est dépasser sa nostalgie. Le monde et la société bougent sans cesse. Les sciences et techniques déferlent à un rythme effréné : la planète compte 12 millions de chercheurs, 110 000 revues scientifiques, 1 million de brevets sont déposés chaque année… Innover, c’est intégrer le meilleur des connaissances du moment pour faire progresser la condition humaine. Quand Apple sort un nouvel iPhone tous les six mois, si cela n’améliore pas la vie des gens, dans le sens de se loger mieux, manger mieux, se transporter mieux, etc., cela ne sert pas à grand-chose, ce n’est pas du progrès.
L’innovation est-elle motivée par la compétition ?
Pas forcément. Je l’associerais plutôt à l’évolution, à l’adaptation. A la lutte contre sa propre inertie. Contrairement à une idée reçue, les entreprises ne cherchent pas la bagarre. Elles préféreraient s’arranger entre elles. L’obsession des dirigeants de Renault n’est pas d’éliminer Peugeot. Les grands de l’automobile ont plus d’une centaine de programmes coopératifs ensemble. En Europe, presque tous les secteurs se sont fait condamner pour entente, des fabricants de lessive aux opérateurs de téléphonie.
En revanche, il est impossible d’arrêter la marche du monde. A chaque fois qu’arrive une nouveauté, le système essaie de la contrer, et elle passe quand même. Cela a été le cas de l’imprimerie : trente-cinq ans après son invention, elle était toujou