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Décryptage

Les ouvriers français ni trop payés, ni fainéants

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Le réquisitoire du PDG de Titan contre l'industrie hexagonale est démenti par les chiffres.
Les ouvriers français travaillaient en moyenne 1 679 heures par an en 2010. (Photo Thomas Samson. AFP)
publié le 21 février 2013 à 16h14

De «soi-disants ouvriers» trop chers et oisifs, une industrie vouée à la disparition : dans sa désormais fameuse lettre à Arnaud Montebourg, le PDG de l'entreprise américaine Titan, Maurice Taylor, dresse un tableau apocalyptique du travail français. Au risque du ridicule, et surtout de l'approximation, comme le démontrent les données relatives aux marchés européens du travail. Le point.

Des salariés trop payés ?

Mesurer le coût du travail est un exercice complexe, donc propice à toutes les manipulations. En effet, la nature exacte de ce qui est mesuré est rarement précisée. S'agit-il du coût horaire moyen du travail en général ? Selon l'intitut COE-Rexecode, proche du patronat, celui-ci est effectivement plus élevé en France (35,30 euros) qu'en Allemagne (32,30 euros) ou qu'au Royaume Uni (22,80 euros). Il a également augmenté plus vite dans l'Hexagone depuis 2000, même si, sur la dernière année, c'est en Allemagne que l'accélération a été la plus marquée. 

Isolons maintenant le seul secteur industriel, au centre du débat. Là, au troisième trimestre 2012, les coûts français et allemands étaient du même ordre, à 36,6 euros et 36,9 euros respectivement, contre 23,5 euros pour le Royaume-Uni. Mais cette donnée seule n’indique pas grand-chose : un travailleur peut coûter plus cher, mais se révéler compétitif s’il est aussi plus productif. Or, les coûts salariaux unitaires français (c’est-à-dire rapportés au nombre d’unités produites) sont comparables avec ceux de l’Allemagne pour l’industrie, et ont baissé sur la période 1996-2008, et particulièrement lors de l’instauration des 35 heures.

Enfin, les situations relatives varient fortement selon les secteurs. Dans l'automobile, par exemple, le coût du travail est