Depuis ses premiers essais, l'Ere du vide (1989) et l'Empire de l'éphémère (1991), il ne cesse d'ausculter les transformations des modes de vie et des comportements. Avec le critique culturel Jean Serroy, Gilles Lipovetsky publie l'Esthétisation du monde (Gallimard), une réflexion sur l'hypermodernité et son corollaire, l'hypertrophie consumériste.
Quel peut bien être le rapport entre capitalisme et esthétisation du monde ?
Si le capitalisme détruit des emplois, défigure les paysages, pollue l'atmosphère, épuise les matières premières et brise parfois les individus, il est aussi le système qui produit et diffuse les biens esthétiques à très grande échelle. Cette dynamique a commencé à partir du milieu du XIXe siècle mais de manière limitée, avec les grands magasins, puis le design appliqué à l'industrie, la pub, le cinéma, la musique. Nous sommes au stade hyperbolique de ce système marqué par l'inflation esthétique. Plus un seul objet qui ne soit objet de design. Jusqu'aux paillassons et aux enseignes de pharmacie. Des produits qui, autrefois, étaient peu associés à la recherche esthétique deviennent des accessoires de mode : brosses à dents, lunettes, montres et jusqu'aux rouleaux de papier toilette ! Cette promotion du paradigme esthétique est l'enfant du capitalisme de consommation. D'où cet oxymore hypermoderne : le capitalisme artiste.
De quoi s’agit-il ?
Le capitalisme artiste est ce système qui incorpore de manière systématique la dimension créative et imaginaire dans les secteurs de la consommation marchande. S’appuyant sur l’