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Libération
Reportage

«La chute sans fin» des chômeurs espagnols

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A Madrid, comme partout en Espagne, les demandeurs d’emploi affluent dans les agences de recrutement. Qui, en dehors de quelques postes alléchants en Europe du Nord, ne proposent pas grand-chose.
publié le 3 mai 2013 à 22h26

Il est sorti en trombe sur le trottoir, les yeux exorbités. Sans même dire son nom, l'air de s'excuser, il a bafouillé : «Je dois filer, ma fille m'attend. Cela fait des mois et des mois que je cherche. Pas un seul job. Rien de rien. Des CV envoyés en pure perte, tout mon temps à me ronger les ongles…» Il doit avoir la quarantaine, cet anonyme en souffrance qui préfère ne pas s'étendre. Un anonyme parmi les 5 millions de chômeurs espagnols dont le nombre - sans doute record - pour le mois d'avril sera livré lundi. Le chômage, ce grand drame de l'Espagne, qui ne cesse de croître : cette année encore, comme une fatalité, le gouvernement a admis que 600 000 nouvelles personnes devraient perdre leur emploi.

Un chômeur anonyme, une agence d’emploi quelconque : nous voici devant la Puerta del Angel, un carrefour bordé par le Madrid Rio, la belle promenade le long de la rivière Manzanares, un chantier pharaonique qui a laissé une dette de plus de 2 milliards d’euros à la municipalité. Tout là-haut, imposants sous un ciel lourd, la cathédrale Almudena et le Palais royal surmontés de grues à l’arrêt. En contrebas, cette modeste agence, coincée entre une clinique et un de ces édifices de brique rouge orangée qui peuplent les quartiers périphériques de Madrid.

Dans la salle d'attente, des regards éteints, des têtes basses, des automates résignés. Sur le trottoir, la fonctionnaire de l'agence Angela s'accorde une rapide pause cigarette. Et soupire : «C'est comme une tumeur av