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Libération
Interview

«La même vision économique low-cost»

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Benjamin Coriat, membre des Economistes atterrés :
publié le 3 mai 2013 à 22h16

Professeur d’économie à l’université Paris-XIII, Benjamin Coriat est coprésident du collectif des Economistes atterrés.

Ce sursis est-il une victoire sur l’orthodoxie de la Commission européenne ?

Nous alertons depuis longtemps sur le fait que ce désendettement simultané à l’échelle européenne ne peut pas marcher et ne fait qu’aggraver la crise. Mais on restait inaudibles quand nous disions que cette austérité nous menait droit dans le mur ! Ce report acte enfin la faillite de la stratégie d’un retour ultrarapide à l’équilibre budgétaire. Ce n’est pourtant qu’une demi-victoire.

Pourquoi ?

L’Europe accorde certes des délais mais elle tient bon sur le fond de sa politique en continuant de réclamer des «réformes structurelles». Si sa stratégie a échoué sur le calendrier, elle ne renonce pas à exiger un alignement par le bas des Etats membres afin de restaurer la compétitivité européenne.

Que voulez-vous dire par là ?

L’allégement de l’Etat social, notamment via la réforme des retraites, la flexibilisation du marché du travail et l’ouverture généralisée de tous les marchés de biens et services à la concurrence sont autant d’ajustements structurels destinés à redonner des marges de manœuvre par une baisse des coûts. C’est toujours la même vision économique et sociale low-cost, fondée sur l’illusion qu’elle permettra de mieux résister aux pays émergents. Or le salut de l’Europe ne peut venir que d’un alignement par le haut, avec une montée en gamme de ses industries, en finançant par exemple un grand plan de transition énergétique.

N’est-ce pas ce que fait déjà l’Allemagne ?

En partie, oui. Contrairement à ce que l’on entend, elle fait toujour