Et si l’«exception culturelle» n’était qu’un chiffon rouge, destiné à détourner l’attention pour mieux faire passer la pilule ? Celle de l’abandon du «modèle européen» au profit d’une logique du tout marché ? Car si la France a réussi à obtenir, vendredi, au prix de treize heures de négociations avec ses partenaires de l’Union, l’exclusion de l’audiovisuel du mandat de négociation confié à la Commission, celle-ci a emporté l’essentiel : la mise en chantier d’un grand marché transatlantique unissant l’Union européenne et les Etats-Unis, les deux principales puissances économiques de la planète, où les biens, les capitaux et les services circuleront librement.
«Harmonisation». Certes, les milieux culturels français et européens peuvent être soulagés que leur secteur reste à l'écart de cette zone de libre-échange. Mais «l'enjeu stratégique du Transatlantic Trade and Investment Partnership [TTIP] est ailleurs», souligne un fonctionnaire européen. En effet, il s'agit non pas d'abaisser des droits de douane déjà historiquement bas (4% en moyenne), mais d'éliminer les «obstacles non tarifaires» aux échanges que sont les normes environnementales, sanitaires, phytosanitaires, les lois protégeant les consommateurs ou les données personnelles, les droits d'auteur, le droit bancaire et financier, l'accès aux marchés publics, etc. En clair, il faut har-mo-ni-ser et créer entre l'UE et les Etats-Unis l'équivalent du marché unique.