Le ballet des bétaillères s'est étiolé. Comme le moral, aussi bas, ce matin-là, qu'un ciel en transhumance. Dans cet abattoir de porcs du groupe Gad, 4 000 bêtes sont avalées par jour, alors que 6 000 pourraient l'être. Ici, surtout, 850 hommes et femmes abattent, découpent, transforment. Tous risquent de passer à la trappe le 20 août, «pas loin de 3 000 personnes, en comptant les emplois indirects», lâche un salarié. Ici, c'est Lampaul-Guimiliau (Finistère), son église, ses 2 500 habitants d'apparence impassible, et son maire, Jean-Marc Puchois, qui refuse de céder à l'impuissance : «Le groupe est là depuis soixante ans, et là, l'actionnaire laisse entendre qu'il va laisser partir un tel outil ? C'est dramatique, suicidaire…» Propriété du groupe coopératif Cecab (connu pour sa marque D'Aucy), Gad aurait perdu «20 millions d'euros en 2012», confie un actionnaire. Faute de repreneur s'étant présenté devant le tribunal de commerce de Rennes pour «mettre un gros billet, de l'ordre de 40 millions d'euros», comme le dit un proche de la direction, rien ne semble pouvoir empêcher la fermeture annoncée.
Un choc pour la Bretagne, berceau de l'agroalimentaire, qui produit 57% des 24 millions de porcs français par an. Un trauma qui s'ajoute aux plans sociaux chez Doux (poulet) et Marine Harvest (saumon). Et entraîne, dans son sillage, un sentiment de résignation, «de défaitisme», lâche un élu local, inhabituel pour la région. «Et ce n'est