Elle avait hanté le référendum de 2005 sur la Constitution européenne. La voilà qui risque d'animer, en pleine récession, la campagne des élections européennes de mai 2014. La directive Bolkestein sur les services, et sa grande sœur de 1996, sur les «travailleurs détachés», sont de retour, accusées de favoriser le dumping social entre pays de l'UE. En particulier dans l'agroalimentaire. Les abattoirs français, en très grande difficulté, attribuent leurs malheurs au dumping social de leurs concurrents allemands, qui abusent de la directive pour sous-payer des ouvriers venus de l'Est.
Jeudi, François Hollande s'en est ému. Dans son discours d'ouverture de la conférence sociale, le chef de l'Etat a expliqué qu'il ne pouvait «pas accepter qu'il puisse y avoir, au nom de cette directive, des concurrences faussées qui détruisent de l'emploi en France». Ni qu'on puisse «utiliser […] le malheur d'un certain nombre de pays pour faire venir des travailleurs européens en les payant à des niveaux qui ne sont pas raisonnables». Il a promis de porter les questions de salaire minimum et «l'organisation d'une harmonisation fiscale en Europe», jeudi et vendredi, en Conseil européen. Un premier pas. Depuis plusieurs mois, des parlementaires s'alarment. Après le «mythe du plombier polonais», écrit le sénateur (PCF) Eric Bocquet dans un rapport parlementaire, c'est «le spectre du maçon portugais ou de l'ouvrier agricole roumain» qui plane.