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Chouettes machines

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publié le 23 juin 2013 à 19h06

«Le drone avait surgi. Une libellule géante de carbone et de réfractaire noir longue de trois mètres, dotée de deux ailes ultracourtes et de deux microrotors. D'une batterie de senseurs thermiques, d'un canon rotatif de 14,5 mm […] et du sang-froid des machines.» Dans Babylon Babies (Gallimard, 1999), Maurice G. Dantec décrivait de manière saisissante l'entrée en action d'un drone de combat dans un présent-futur (2013) ravagé par une guerre sans fin. Depuis, la réalité a largement rattrapé la fiction. Des centaines d'engins volants robotisés ou pilotés à distance survolent en permanence le «théâtre des opérations», comme disent joliment les militaires. En Afghanistan, au Pakistan, en Irak, au Yémen et jusqu'au Mali, ils auraient tué plus de 4 700 personnes, de l'aveu d'un sénateur américain. Ces «objets violents non identifiés» (comme les appelle Grégoire Chamayou, auteur d'une récente Théorie du drone) sont la nouvelle «killer application» de l'Occident pour terroriser les «terroristes» et surveiller les rencontres au sommet dans un monde toujours plus orwellien.

Evidemment, à force de montrer le côté obscur de leur force, ces vautours mécaniques se sont forgé une sale réputation «search and destroy». Celle d'une arme à double tranchant qui, tôt ou tard, se retournera contre le citoyen. Mais les machines sont ce que nous en faisons. Entre des mains bien intentionnées, les drones peuvent devenir «gentils». Leurs yeux de chouette se