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Libération
Le portrait

Esther Duflo, riches idées

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L’économiste française, qui travaille sur la pauvreté, a reçu ce lundi le prix Nobel d’économie, avec les chercheurs Abhijit Banerjee et Michael Kremer. «Libération» l’avait rencontrée en 2013 pour un portrait, que nous republions.
Esther Duflo en juin 2013 à Paris. (Serge PICARD/Serge PICARD)
publié le 2 juillet 2013 à 19h06
(mis à jour le 14 octobre 2019 à 12h51)

Carré discret de la chevelure, visage galbé sans fard ni artifice, son naturel se voûte jusqu’au creux des épaules, assujetties depuis longtemps à une modestie protestante. Son prénom ne surprend pas. Esther, économiste spécialiste de la pauvreté, a ceci de commun avec la reine de l’Ancien Testament, épouse du roi de Perse Assuérus, qu’elle cultive une ascèse spontanée, doublée d’un altruisme exalté.

Rien de ce menu corps ne trahit l'aura qui l'entoure, encore moins ce parler presque chuchoté, aux assertions comme en lévitation, en quête du mot idoine. Pourtant, en 2010, Esther Duflo - qui fut chroniqueuse à Libération de 2002 à 2009 - décroche la médaille John-Bates-Clark, sorte de préalable au prix Nobel d'économie. En 2011, le magazine Time classe cette enseignante au Massachusetts Institute of Technology (MIT) parmi les cent personnalités les plus influentes au monde. Et en 2012, onction suprême, elle intègre le Comité pour le développement mondial, chargé de conseiller Barack Obama sur les problématiques d'aide au développement des pays pauvres. Déconcertante d'humilité, quand d'autres auraient pontifié avec superbe, Esther Duflo se contente de clore le chapitre : «C'est une mission purement consultative, comme il en existe des centaines. Je n'ai jamais rencontré Obama, ni même échangé de mail avec lui.» Esther Duflo louvoie ainsi à la lisière du pouvoir, distribue avis et conseils techniques aux puissants, sans jamais entrer dans l