Une République exemplaire, nous a-t-on promis. Le projet de loi, soumis au vote des sénateurs le 17 juillet et destiné à éteindre l'incendie Cahuzac, apporte bien quelques inflexions. Mais la confiance de nos concitoyens dans leurs institutions, durablement ébranlée, ne saurait être restaurée tant que perdurera dans notre pays une justice à deux vitesses. Celle des délinquants de droit commun, assurés pour un vol avec récidive de finir derrière les barreaux. Et celle des nantis et des grandes entreprises qui, quand ils volent la collectivité - car la fraude fiscale n'est rien moins que cela -, jouissent d'un traitement d'exception. Que «toutes les grosses fortunes négocient leurs impôts» (selon Henri Guaino), est-ce tolérable ?
Faisons l’hypothèse qu’un nouveau ministre soit passible de poursuites pour fraude fiscale. Pareille affaire parviendrait-elle un jour devant le juge ? Si le fisc en est saisi, il faut, passées les validations hiérarchiques, le feu vert du ministre du Budget pour transmission à la Commission des infractions fiscales (CIF). Curieusement, le nombre de dossiers déposés devant cette autorité plafonne depuis vingt ans : guère plus de mille, portant sur des montants significatifs, mais assez simples et bien ficelés pour faciliter les condamnations pénales. Exit, donc, les «petits» dossiers, même s’ils concernent des personnalités. Exit, aussi, les montages hypercomplexes des multinationales. La CIF, sans motiver sa décision, transmet (généralement)