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Analyse

Mieux vaut hériter que mériter

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Les chroniques de Thomas Pikettydossier
Dans son essai «le Capital au XXIe siècle», l’économiste Thomas Piketty dénonce l’impact de l’héritage sur l’accroissement des inégalités sociales.
Devant le domicile de Liliane Bettencourt, héritière de L'Oréal, à Neuilly. (PHOTO FRED DUFOUR. AFP)
publié le 1er septembre 2013 à 20h26
(mis à jour le 3 septembre 2013 à 11h39)

Socialement, c'est une thèse explosive. Alors que l'économie est en berne, qu'experts et politiques se disputent sur des décimales de croissance, jamais le poids de l'héritage n'a autant pesé dans la répartition des richesses. Comble du cynisme financier, une faible croissance, comme celle que traverse la France, favorise encore davantage les patrimoines établis que les salaires mensuellement acquis. «L'héritage n'est pas loin de retrouver en ce début du XXIe siècle l'importance qu'il avait à l'époque du Père Goriot.» C'est à cette conclusion à rebours de l'idée de progrès pour tous que parvient l'économiste Thomas Piketty (1) dans le Capital au XXIe siècle, l'un des livres événement de la rentrée.

Rentiers. Certes, les héritiers d'aujourd'hui ne se distinguent plus par des hauts de forme portés par une poignée d'individus. L'émergence d'une classe moyenne patrimoniale au XXe siècle a dilué les héritages façon Balzac, avoisinant les 30 millions d'euros, en de multiples sommes plus restreintes - de 200 000 à 2 millions. La France est ainsi devenue une société de rentiers plus ou moins riches, notamment grâce à l'envolée des biens immobiliers (lire page 14). Conséquence directe de cette suprématie des revenus du capital sur ceux du travail, les inégalités sont reparties à la hausse depuis la fin des années 70. Entraînées aussi par l'explosion sans précédent des très hauts revenus d