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Interview

«Les inégalités de revenus n’affectent pas que les pauvres»

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Richard Wilkinson, coauteur de «Pourquoi l’égalité est meilleure pour tous», mesure l’impact social de l’idéologie néolibérale :
Un mendiant dans le centre de Málaga, en Espagne. (Photo Jon Nazca. Reuters)
publié le 17 octobre 2013 à 19h36

Richard Wilkinson (Photo DR) est professeur d'épidémiologie à l'université de York, au Royaume-Uni. Il a coécrit avec sa consœur Kate Pickett et publié en 2009 Pourquoi l'égalité est meilleure pour tous, qui vient de paraître en France. Vendu à plus de 140 000 exemplaires en Grande-Bretagne et traduit dans plus de quinze langues, l'ouvrage fait voler en éclats la théorie néolibérale selon laquelle «plus les riches sont riches, mieux la société se porte».

Comment démontrez-vous que les inégalités de revenus engendrent une série de fléaux sanitaires et sociaux ?

Avec des preuves scientifiques établissant que des problèmes tels que la mauvaise santé physique et mentale, l’obésité, la maternité précoce, l’échec scolaire, la violence, le taux d’incarcération et d’homicide, l’addiction aux drogues, etc. sont de deux à dix fois plus fréquents dans les sociétés dont les inégalités de revenus entre riches et pauvres sont élevées. Celles-ci endommagent le tissu et la qualité des relations sociales, et n’affectent pas que les pauvres : l’ensemble de la société est touchée.

Pourquoi les inégalités peuvent-elles déstabiliser une société ?

Les êtres humains sont très sensibles à la hiérarchie sociale. Depuis la Révolution française, les gens ont pris conscience que l’inégalité divise, qu’elle est corrosive. Les écarts de richesse matérielle créent de la distance sociale, nous isolent les uns des autres. La coopération et la réciprocité sont remplacées par l’intérêt personnel et la compétition.

L’égalité encouragerait, selon vous, l’innovation et le talent…

Il y a légèrement plus de brevets par habitant dans les pays plus égalitaires. Car la mobilité sociale y est plus élevée, comme le taux d’alphabétisation ou la s