Eric Bocquet est sénateur PCF du Nord et membre de la commission des affaires européennes (photo AFP). Il a coordonné un rapport, intitulé «Travailleur détaché, un salarié low-cost ?», publié en avril, sur ce dispositif qui permet à un employeur d’un pays membre de l’UE d’envoyer provisoirement un salariés poursuivre ses fonctions dans un autre pays membre où il a par exemple remporté un contrat. Qu’une centaine d’intérimaires roumains travaillent dans celui des deux abattoirs Gad qui ne ferme pas a notamment été source de tensions la semaine dernière.
La semaine qui vient de s’écouler autour de l’abattoir Gad, à Josselin, renforce-t-elle vos inquiétudes ?
Cette séquence hallucinante me plonge dans l’effroi. Avec, en point d’orgue, ces séquences terribles où les salariés d’une même entreprise en viennent au coup-de-poing alors que la menace pèse sur eux et sur la survie même de leur entreprise. Ce qui se passe en Bretagne est potentiellement dévastateur. L’exaspération autour des travailleurs détachés roumains est un mauvais combat, cette xénophobie surfe sur des boucs émissaires. Quand la classe ouvrière se déchire ainsi, c’est, économiquement, le patronat qui en profite. Et, politiquement, le FN, qui attise et prospère sur ce terreau de la peur. Il faut absolument agir - et vite - si l’on veut éviter que cela macère davantage et que la situation ne devienne davantage explosive. Voilà ce qui arrive lorsque l’Europe inscrit en lettres d’or l’idéal d’une «concurrence libre et non faussée» au détriment d’une harmonisation sociale par le haut. Ce qui se passe était inscrit dans les