«L'intelligence de la technique» est en train de réussir en douceur là où toutes les dictatures du XXe siècle ont échoué dans le sang : un homme nouveau naît sous nos yeux, sans heurts ni révolution apparente, sans guerre ni crimes de masse. A l'aube du troisième millénaire, avec l'avènement du grand réseau omniscient, l'humanité est entrée dans la matrice numérique et en a été «augmentée» à l'insu de son plein gré. C'est la victoire d'un soft power inédit : celui de la machine créée par l'homme et pour l'homme, nous dit en substance Eric Sadin. «Enveloppés» dans un océan de données, assistés par «la puissance phénoménale des agents robotisés», «redoublés d'effigies artificielles», nous avons confié notre destinée à une «intelligence ambiante» qui s'incarne pour l'heure sur l'écran tactile des smartphones. Et s'infiltrera demain à l'intérieur même de nos corps. Cette nouvelle «souveraineté numérique» nous administre un peu plus chaque jour, «pour le meilleur et le moindre risque». Sans que nous en ayons forcément conscience. Mais la comparaison avec Hal, l'intelligence artificielle rebelle de 2001, l'Odyssée de l'espace, s'arrête là. Pour le philosophe, il ne faut pas avoir peur : «l'homme augmenté» n'est ni le jouet de la machine, ni un surhomme nietzschéen, ni cette inquiétante créature hybride forgée par la mythologie transhumaniste. Ce «corps-interface» au service d'un co
Éditorial
Homme machine
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publié le 27 octobre 2013 à 18h06
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