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Interview

«Le Canada est très complaisant avec l’industrie minière»

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Le Spécialiste des paradis fiscaux Alain Deneault démontre que le Canada est devenu un havre pour des sociétés minières aux méthodes écologiquement et socialement condamnables.
publié le 10 novembre 2013 à 18h06

Le Canadien Alain Deneault est enseignant en sciences politiques, à l'Université de Montréal. Spécialiste des paradis fiscaux, il a notamment coécrit avec son compatriote William Sacher Paradis sous terre. Comment le Canada est devenu une plaque tournante pour l'industrie minière mondiale (Rue de l'échiquier, 2012).

En Grèce et en Roumanie, les projets miniers contre lesquels se battent les populations sont tous deux canadiens. Est-ce un hasard ?

Absolument pas. Et c’est un copié-collé de ce qu’on constate en Afrique, en Amérique latine. Comme dans «Rocky 7», puis «8», les acteurs sont différents mais le scénario est le même. Certains, en France, veulent relancer le secteur minier. Ce ne sont pas des sociétés françaises qui exploreront, mais des canadiennes ! Qui arriveront avec leurs méthodes, et ça ne sera pas beau. On voit en Grèce ce dont Eldorado Gold est capable. Et l’Etat collabore : ratonnades, emprisonnements de militants… L’écosystème sera dévasté, pour peu d’emplois locaux créés. C’est effrayant.

Mais pourquoi des sociétés canadiennes ?

Parce que plus de 75% des sociétés mondiales d’exploration ou d’exploitation minière (cuivre, coltan, cobalt, fer, or, uranium, diamants, etc.) ont leur siège social au Canada, et près de 60% de celles qui sont cotées en Bourse s’enregistrent à Toronto. Les capitaux ne sont pas forcément canadiens, ils sont australiens, français, suédois, israéliens ou américains. Mais le Canada est un paravent pour cette industrie controversée. Un pays offshore, un havre, une sorte de «Suisse des mines», coupable de beaucoup de passivité et de complaisance vis-à-vis de ce secteur, qu’il attire en lui aménageant