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Interview

«Seuls les petits comptes quittent la Suisse»

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Pour l’économiste Gabriel Zucman, l’évasion fiscale est loin d’être en déclin.
publié le 14 novembre 2013 à 21h06

A en croire les banquiers suisses, le secret bancaire serait terminé et les Français fraudant le fisc en train de fermer leurs comptes. Des affirmations corroborées par Bercy, qui indique que plus de 4 000 Français se sont présentés à la cellule de régularisation fiscale pour déclarer leurs avoirs cachés. Cet optimisme ne convainc pas l'économiste Gabriel Zucman. Chercheur à Berkeley, aux Etats-Unis, il a recoupé des statistiques internationales jusque-là inexploitées pour chiffrer l'évasion fiscale au niveau mondial. Il en livre une version accessible au grand public dans la Richesse cachée des nations (1). A lire absolument pour savoir où et comment piocher l'argent qui manque aux finances publiques.

Les banquiers suisses disent qu’ils n’auront bientôt plus de clients français fraudeurs. Est-ce vrai ?

Non. L'objectif de ces banquiers, c'est de nous faire croire qu'ils sont devenus clean, et que ce n'est plus la peine de les embêter. La réalité, c'est que, si on croit les statistiques mensuelles de la Banque nationale suisse (BNS) - qui n'est pas un repère de dangereux gauchistes -, il n'y a jamais eu autant d'argent étranger dans les établissements helvétiques qu'aujourd'hui : 1 800 milliards d'euros, soit 14% de plus qu'en 2009, quand le G20 de Londres avait décrété la «fin du secret bancaire». Et si on y a un compte, c'est avant tout pour ne pas payer le fisc.

C’est un mensonge, alors ?

Cet arrangement avec la réalité s’explique d’abord par l’explosion des avoirs détenus par les ultrariches, ces personnes qui possèdent des dizaines de millions d’euros. Cela permet de compen