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Libération

«Libé» : c’est quoi être libre ?

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Les chroniques de Thomas Pikettydossier
publié le 24 février 2014 à 17h06

La crise à Libé a au moins le mérite de poser une question essentielle. C'est quoi être libre quand on est possédé par un actionnaire, et de surcroît par un actionnaire imbu de son pouvoir ? Quelles formes de gouvernances alternatives doit-on inventer au XXIe siècle pour échapper à la dictature du propriétaire tout-puissant, et permettre enfin un contrôle démocratique et participatif du capital et des moyens de production ? Cette question éternelle, que certains ont cru pouvoir refermer après la chute de l'anti-modèle soviétique, n'a en vérité jamais cessé d'exister. Elle se pose notamment dans le secteur des journaux et des médias en général, où des structures de propriété mixte sous forme d'associations ou de fondations ont récemment connu un regain d'intérêt, avec le double objectif de garantir l'indépendance des rédactions et de promouvoir des modèles innovants de financement. Dans le contexte de crise aiguë que connaissent actuellement les médias, menacés par une concurrence effrénée et un émiettement des rédactions, c'est l'ensemble du modèle qui doit être repensé - comme l'ont montré les travaux récents de Julia Cagé, économiste à l'université de Harvard et à l'Ecole d'économie de Paris.

Mais la question des formes alternatives de propriété du capital se pose également dans l’ensemble des secteurs culturels et éducatifs, sur tous les continents. A ma connaissance, personne n’a jamais proposé de transformer l’université Harvard (dont la dotation dépa