Doit-on produire en Afrique des agrocarburants destinés à l'exportation alors que les terres manquent aux populations pour assurer leur sécurité alimentaire ? C'est l'un des effets pervers d'une directive européenne de 2009 qui fixe un objectif de 10% d'énergie renouvelable dans le transport d'ici à 2020. «Tous les Etats se sont rués sur les biocarburants qui non seulement ne contribuent pas à diminuer les gaz à effet de serre mais s'avèrent le principal moteur mondial de l'accaparement des terres au profit des firmes de l'Union», dénonce Renée Vellvé, de l'association Grain et Prix Nobel alternatif. Qui s'alarme : «Jamais la pression sur les terres en Afrique n'avait été aussi forte.» Selon l'ONG ActionAid, 6 millions d'hectares ont ainsi été dévorés par la culture des agrocarburants sur le continent en moins de cinq ans.
«Obscurs». La voix posée, Fatou Ngom, d'ActionAid Sénégal, est venue en France lancer une campagne européenne pour dénoncer ces spoliations : «Dans notre pays, on est passé de 168 000 hectares happés par des multinationales de l'agrobusiness en 2008 à plus de 844 000 aujourd'hui», énumère-t-elle. Soit presque le quart des 3,8 millions d'hectares de terres cultivables du Sénégal. Une captation obtenue avec la bénédiction de l'Etat : «Au Sénégal, les firmes ne peuvent pas acheter des terres sans passer par une joint-venture locale.» Un deal souvent factice. «Les montages sont obscur