Pour Laurence Tubiana, professeure à Sciences-Po et fondatrice de l’Institut du développement durable et des relations internationales (Iddri), la rencontre entre innovations sociales et technologiques peut créer les conditions d’un développement - vraiment - durable.
L’expression «développement durable» est de plus en plus critiquée, notamment par ceux qui y voient un paradoxe. Qu’en pensez-vous ?
Une fois qu’on a dit ça, qu’est-ce qu’on fait ? Cette critique n’incite pas à l’action. Mais il est vrai que nous avons dépassé des seuils dangereux. La croissance économique détruit les écosystèmes et ne répond même plus aux problèmes de développement : elle ne nourrit pas les gens… Imaginer qu’il suffit d’équilibrer les piliers sociaux, environnementaux et économiques pour qu’on soit tranquilles mène aussi à une forme d’immobilisme. En ce sens, effectivement, la notion de développement durable nous a endormis. On ne voit pas d’inflexion générale des modèles de développement qui pourrait répondre à cette équation : à la fois augmenter en nombre, accroître la consommation matérielle et le bien-être et ne pas accélérer les destructions. Mais la bonne nouvelle, c’est qu’il n’existe plus de pays où il n’y a pas de questionnement sur le bien-être.
C’est-à-dire ?
De la Chine au Brésil en passant par la Russie ou l'Ethiopie, on trouve des acteurs, y compris des entreprises, qui n'aspirent plus forcément à ressembler à l'Occident. On sort de quarante ans où l'idée était de rattraper ce modèle, sans le