Professeure à l'université Paris-Dauphine, la sociologue Dominique Méda est, avec Patricia Vendramin, l'auteure de Réinventer le travail (PUF, 2013).
Comment réagissez-vous à ce catalogue de mesures censées lever les freins à l’emploi en France?
Les employeurs disposent déjà aujourd’hui de tous les moyens pour adapter leurs effectifs. C’est le cas avec les ruptures conventionnelles, un dispositif qui a explosé depuis sa mise en place en 2008. La fixation de la durée de temps de travail à 35 heures n’est pas non plus un frein. Il ne s’agit que du seuil de durée légale au-delà duquel se déclenchent les heures supplémentaires mais avec des dispositifs dérogatoires.
Le Medef exagère-t-il ?
Les employeurs jouent leur carte mais cette surenchère n'est pas nouvelle, elle existe au moins depuis que le droit du travail est apparu au XIXe siècle avec le premier texte de 1841 réglementant la durée du travail… des enfants. L'histoire du droit du travail est celle du refus de considérer le travail comme une marchandise mais c'est une lutte permanente entre cette tentation de supprimer les protections patiemment construites et le souci de prendre en considération les droits des travailleurs.
Ce projet vise à créer 1 million d’emplois alors que le Medef refuse de s’engager sur des contreparties au «pacte de responsabilité». Est-ce cohérent ?
L’argumentaire se mord la queue. Lorsqu’on lui demande de s’engager, le Medef dit que c’est impossible parce que tout dépend du carnet de commandes et de l’activité. La question centrale est donc celle de la demande adressée aux entreprises. Entre 1997 et 2002, quand 2 millions d’emplois ont été créés en France - en partie grâce aux lois Aubry-, il y avait la même réglementation. Elle n’a rien empêché…