Egon Rattei, 68 ans, est la version est-allemande du gentleman-farmer. Toute sa vie, il l’a passée dans l’agriculture. A la chute du Mur, c’est lui qui, à Forst (Brandebourg), a géré le passage de la LPG («coopérative de production agricole») à l’économie de marché. La région est pauvre, la terre est chiche, tout juste bonne pour la pomme de terre et le fourrage, l’élevage du porc et la production de lait.
Lorsque Egon Rattei débute en 1963, les agriculteurs de Forst viennent de se regrouper en LPG - l'équivalent est-allemand des kolkhozes soviétiques - conformément aux ordres du régime. La collectivisation du bétail suivra à la fin des années 60. «Au début de la collectivisation, ça a été un grand stress pour les familles, explique-t-il. Mais assez rapidement, les agriculteurs se sont identifiés au mouvement : ceux qui, avant, ne pouvaient jamais partir en vacances, car il fallait traire les vaches, ont découvert les horaires de travail fixes, les congés payés, l'accès à la culture et plus de solidarité dans les villages. Surtout, les agriculteurs ont réparti entre eux les gains. Mais aussi les risques…» En 1990, la LPG de Forst compte 3 800 hectares et 450 salariés, des mécaniciens aux trayeuses, en passant par les responsables du plan, des machines, du département pommes de terre ou de la production de lait.
«Difficile». A la veille de la chute du Mur, la RDA comptait près de 5 millions d'hectares de terres agricoles r