Il y a un mois, Jeremy Rifkin courait les rédactions parisiennes pour présenter son dernier livre (la Nouvelle Société du coût marginal zéro, éd. Les liens qui libèrent), qui prédit l'avènement d'une forme de capitalisme plus collaboratif. L'américain moustachu portant trois pièces-cravate est le plus célèbre des prospectivistes, et ses ouvrages s'arrachent. Loin des boules de cristal de Madame Irma, ce spécialiste, parfois appelé futurologue, ne prédit pas l'avenir mais fait appel à diverses disciplines scientifiques pour élaborer des scénarios probables. Née aux Etats-Unis dans les années 40 avec les travaux de la Rand Corporation, la prospective a été théorisée en France par le philosophe Gaston Berger, qui fonde la revue Prospective en 1957, et par Bertrand de Jouvenel, inventeur du concept des «futuribles» (futurs possibles) en 1960. Aujourd'hui, la revue Futuribles, dirigée par son fils Hugues de Jouvenel, continue de propager la bonne parole prospectiviste à la française.
Les techniques employées pour décrire ces futurs possibles sont nombreuses : méthode Delphi (organiser la consultation d'experts sur un sujet précis), méthode des scénarios (imaginer des évolutions plausibles d'un secteur d'activité), matrice de découverte (tableau à double entrée qui permet de confronter deux types de variables), etc. Joël de Rosnay, grand nom de la prévision technologique «made in France» depuis trente ans, a mis au point sa propre méthode, la prospective