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Libération

La roue tourne pour le parc éolien français

Énergie . En 2014, la puissance du secteur a fortement progressé, portée par la sécurisation du tarif d’achat réglementé de l’électricité.
publié le 18 janvier 2015 à 18h56

Cloué au sol depuis des années, l'éolien français décollera-t-il pour de bon ? Les professionnels du secteur se sentent pousser des ailes, vu l'envolée de la puissance raccordée au réseau en 2014. L'an dernier, 1 042 mégawatts (MW) de nouvelles capacités ont été installés en France, selon France Energie Eolienne (FEE). «Soit l'équivalent d'un million de nouveaux foyers qui ont vu leur consommation électrique domestique (hors chauffage) couverte par l'éolien», se félicite l'association, qui représente plus de 11 000 emplois en France.

Pour Frédéric Lanoë, président de FEE, il s'agit «d'un vrai tournant. C'est 60% de plus qu'en 2013». Cette année-là, le secteur n'avait enregistré que 632 MW de nouvelles capacités, après quatre ans de baisse consécutive, due notamment à une législation complexe et défavorable. On n'est pas encore au niveau de 2009, quand la puissance installée avait atteint 1 247 MW, mais «avec 1,5 milliard d'euros d'investissements, la courbe des raccordements s'inverse», se réjouit FEE.

Cinq mâts. Sur le podium des installations l'an dernier : la Champagne-Ardenne, la Picardie et le Languedoc-Roussillon. Les professionnels louent l'effet d'un récent «volontarisme politique». Parmi les mesures clés figure la loi Brottes de 2013, qui a supprimé les «zones de développement éolien» (au cadre trop restrictif) et le seuil de cinq mâts minimum pour la construction d'un parc. Pour Frédéric Lanoë, «la raison numéro 1 de ce redécollage, c'est la sécurisation du tarif d'achat réglementé, qui incite à nouveau les banquiers à financer les projets».

Mais la France a accumulé du retard et ne compte que 9 000 MW d'éolien installés, uniquement terrestre. Or la loi sur la transition énergétique, qui sera examinée au Sénat début février, fixe pour 2020 l'objectif de 19 000 MW d'éolien terrestre et 6 000 MW d'éolien en mer. «Pour l'offshore, 3 000 MW ont été attribués par appel d'offres. Théoriquement, on pourrait les installer avant 2020, mais il suffirait d'un recours pour que ça capote. La probabilité qu'il y ait ne serait-ce que 500 MW d'offshore en 2020 est assez faible», explique Jean-Louis Bal, président du Syndicat des énergies renouvelables (SER). Afin d'atteindre l'objectif national, il faudra donc mettre le turbo et «concrétiser le raccordement de 1 600 MW par an», calcule la FEE. Pour accélérer, les professionnels réclament le maintien du tarif d'achat bonifié de l'électricité éolienne au-delà du 1er janvier 2016, date-butoir pour l'instant prévue par la loi sur la transition énergétique. «Tant que le marché de l'électricité français n'aura pas été modernisé, il serait impensable que la France ne garantisse pas ce tarif et s'exclue d'un contexte mondial qui s'avère porteur», note l'association.

Recours. Vendredi, la ministre de l'Ecologie, Ségolène Royal, a donné des gages en annonçant que le tarif d'achat de l'éolien terrestre pourra être maintenu au-delà de 2015. Mais il reste des obstacles. Le secteur compte sur la loi Macron (lire aussi page 15) afin de simplifier les procédures d'autorisation pour la construction de parcs éoliens et réduire la chaîne des innombrables recours contre les projets, qui mettent souvent entre six et huit ans à aboutir.

Alors l'éolien français va-t-il enfin commencer à peser ? Jean-Louis Bal se dit «confiant mais vigilant». Un fin connaisseur du secteur est plus circonspect : «Il reste bien des freins à lever. Les professionnels qui se réjouissent, c'est surtout un jeu d'acteurs politiques. Ils cirent les pompes de Royal qui parle peu d'énergies renouvelables, et quand elle le fait, ne parle que d'éolien, alors que le solaire, lui, est à l'agonie.»