La justice française accentue sa pression sur la banque suisse UBS. Depuis mardi, trois anciens cadres dirigeants de la plus grande banque de gestion de fortune au monde sont visés par un mandat d’arrêt. Ils n’ont pas répondu à une première convocation des juges en charge du dossier.
Dans cette affaire, lancée par la dénonciation d’anciens salariés d’UBS, elle est soupçonnée d’avoir permis à ses commerciaux de démarcher, en toute discrétion et en violation de la loi, de riches clients en France. Selon la justice française, des chargés d’affaires suisses d’UBS auraient, des années durant, démarché des industriels, des vedettes et autres sportifs. C’est lors d’événements comme Roland Garros ou des tournois de golf que les commerciaux établissaient des contacts avec de grosses fortunes.
En juin 2013, la banque avait été mise en examen pour «démarchage illicite», accusant sa filiale française de «complicité». Un an plus tard, les juges frappent très fort en exigeant que la caution versée par la banque, initialement de 1,8 million d'euros, soit portée à 1,1 milliard d'euros. Les juges d'instructions parisiens, Guillaume Daïeff et Serge Tournaire, estiment à plus de 10 milliards d'euros les actifs non déclarés au fisc français et gérés par UBS entre 2004 et 2012.
L’affaire de la caution avait fait grand bruit alors que l’hypothèse d’une procédure de plaider-coupable, qui impliquait une amende et une reconnaissance de culpabilité par la banque, avait été envisagée puis écartée. UBS aura tout fait pour l’éviter. En vain. Elle a été contrainte de la verser fin septembre et risque une amende qui pourrait s’élever à 5 milliards d’euros.
L'une des pièces clés du dossier est une note anonyme dévoilant l'existence d'un «carnet de lait». Cette note, transmise à l'Autorité de contrôle prudentiel, détaille un système de double comptabilité, consigné par écrit ou sur un fichier informatique, permettant de noter les ouvertures de comptes non déclarées en Suisse. Ce système aurait permis de ne pas laisser de trace officielle, tout en garantissant un calcul discret des bonus des chargés d'affaires pour leurs opérations en France.
Ces trois mandats d’arrêt viennent allonger la liste des anciens cadres d’UBS inquiétés à l’étranger. Aux Etats-Unis, les autorités font pour l’heure état d’un bilan mitigé dans la poursuite des banques suisses soupçonnées d’aide à l’évasion fiscale. Sur les 38 banquiers faisant l’objet d’un mandat d’arrêt américain, 7 ont plaidé coupable, 2 ont été condamnés en première instance, 2 sont toujours en attente de procès et 2 ont été acquittés. Bercy ne manquera pas de se féliciter de cette accélération des poursuites. La cellule de «dégrisement» des comptes cachés à l’étranger, principalement en Suisse, a déjà récupéré 2 milliards d’euros. Quant à UBS, elle vient tout récemment de provisionner 1,8 milliard. Au cas où…