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Libération
Interview

Laurent Pinatel «On favorise la volaille bas de gamme, gavée au soja américain OGM»

Questions à Laurent Pinatel, porte-parole de la Confédération paysanne.
publié le 18 février 2015 à 20h06

Chaque année, à l’approche du Salon de l’agriculture, les gouvernements de droite comme de gauche donnent des gages à la FNSEA, le principal syndicat agricole. 2015 ne déroge pas à la règle. Mercredi, l’exécutif a notamment annoncé des mesures facilitant l’agrandissement des élevages de volailles, comme cela avait été le cas l’an dernier avec les porcheries. Le seuil à partir duquel une autorisation est requise sera relevé de 30 000 à 40 000 volailles en juin. Réaction de Laurent Pinatel, porte-parole de la Confédération paysanne, le troisième syndicat agricole.

Que pensez-vous de ces mesures ?

Elles vont dans le sens du discours du président de la FNSEA, Xavier Beulin, qui réclame toujours moins de contraintes environnementales. Cela favorisera la production de volailles bas de gamme, gavées au soja américain OGM, pour être exportées au Moyen-Orient. L’année de la grande conférence de Paris sur le climat, on conforte le modèle productiviste actuel, peu vertueux. C’est surréaliste, court-termiste, pas du tout adapté aux enjeux d’avenir et irresponsable. Considérer l’environnement comme une contrainte n’a aucun sens : si on ne respecte pas la nature, c’est notre métier qui, à terme, est menacé. Nous devons changer de modèle et favoriser une agriculture de qualité, relocalisée, à haute valeur ajoutée.

Oui, mais l’emploi ?

La concentration des élevages détruit des emplois. Il y a moins de 400 000 paysans aujourd’hui, cela ne cesse de baisser. On industrialise l’agriculture au détriment des paysans. Nous annoncerons vendredi une carte de cette industrialisation : nous avons identifié 30 fermes-usines emblématiques en France . Très souvent, le groupe Sofiprotéol, présidé par Xavier Beulin, est impliqué. Sa double casquette pose problème.

Le gouvernement vous écoute-t-il ?

Nous représentons 20% des paysans. Mais, plus que jamais, nous avons le sentiment que la gestion du ministère de l’Agriculture a été déléguée à la FNSEA et l’agro- industrie . Elle veut sauver la production, nous voulons aussi sauver les producteurs.