Pour qui aime les nombres suivis de neuf zéros, la présentation des résultats trimestriels d'Apple est toujours une grande fête. Celle de mardi soir n'a pas dérogé à la règle. Le groupe américain a dévoilé un bénéfice net de 10,7 milliards de dollars (9,8 milliards d'euros) entre début avril et fin juin pour un chiffre d'affaires de 49,6 milliards de dollars, en augmentation de 33% sur un an. Une «croissance alimentée par des ventes records d'iPhone et de Mac pour le troisième trimestre [l'année fiscale débute en octobre, ndlr]» et le «lancement réussi de l'Apple Watch», triomphe la firme dans un communiqué.
Pourtant, immédiatement après l’annonce, alors que Wall Street avait fermé, la capitalisation boursière d’Apple chutait de 60 milliards de dollars. En cause : des résultats moins bons qu’au trimestre précédent — durant lequel l’entreprise réalisait 13,6 milliards de bénéfices et 58 milliards de chiffre d’affaires — couplés à une ambition plus frileuse que la prévision moyenne des analystes pour le quatrième trimestre, et surtout, des inquiétudes sur l’avenir de ses produits phares.
Silence gêné
«Les chiffres de vente sont décevants pour l'iPhone», relevait le Wall Street Journal mardi soir. Tant pis pour les 47,5 millions d'unités vendues entre avril et juillet, qui se situent légèrement en dessous des attentes des analystes, constate l'AFP. On craint désormais pour l'avenir du smartphone de luxe, dont le dernier né a pourtant explosé les records de vente de la famille. L'entreprise, il est vrai, reste très dépendante de sa gamme d'iPhone, qui représente près des deux tiers des revenus. Et son succès ne sera pas éternel.
Pour ne rien arranger, la relève tarde à arriver. De la présentation des résultats d’Apple, tout le monde attendait les premiers chiffres de vente de l’Apple Watch, la montre connectée lancée en grande pompe par la marque fin avril. L’objet trouve-t-il son public ou suivra-t-il les Google Glass au cimetière des inventions foireuses ? Mardi soir, la multinationale s’est contentée d’un silence gêné.
Le boss, Tim Cook, a simplement glissé que les ventes dépassaient les attentes de l’entreprise. On se souvient pourtant que lors des lancements des premiers iPhone (2007) et iPad (2010), Apple ne s’était pas privé de balancer les chiffres de ventes dès les premières semaines. De son côté, l’analyste Gene Munster, de Piper Jaffray, grand spécialiste de la pomme, estime que la firme de Cupertino n’avait vendu que 2 millions à 3 millions de Watch fin juin, là où d’autres attendaient au moins 5 millions de montres écoulées…
«Si la Watch avait cartonné, Apple ne se serait pas privé de le dire»
Pour le magazine Wired, «cette réticence à donner les chiffres n'est pas vraiment une surprise. Tim Cook a expliqué par le passé son intention de garder le silence sur les ventes pour des raisons de concurrence. Mais on ne peut s'empêcher de penser que si la Watch avait cartonné, Apple ne se serait pas privé de le dire».
A la place, les revenus de la montre ont été camouflés dans une ligne de compte baptisée «autres produits», où figurent pêle-mêle ceux du baladeur musical iPod et des abonnements au service de streaming musical Beats Electronics. Que le chiffre d’affaires de cette section soit en hausse par rapport au dernier trimestre et à l’an dernier n’y change rien : le doute ne se dissipera que lorsque l’ampleur du démarrage de la montre sera connue. Et ce ne sera sans doute pas le cas avant les prochains résultats, mi-octobre.