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Libération
EDITORIAL

Cohabiter

Publié le 28/07/2015 à 19h56

Imaginez. Vous faites face à une tête posée sur un meuble quelconque. Non seulement cette tête parle, mais elle répond à vos questions et réagit en fonction de la conversation. Plus encore, elle possède les souvenirs d’une personne qui a existé et qui y a transféré les siens. Ce n’est pas de la science-fiction, ce robot à mémoire humaine est réel. Il s’appelle Bina48 et est le porte-étendard d’un mouvement transhumaniste américain. La question fondamentale n’est pas de savoir comment ce robot réagit avec vous mais comment vous, vous allez réagir face à lui. Car ce qui se joue, c’est que pour la première fois, nous allons devoir cohabiter sur la Terre avec une espèce que nous avons créée et qui pourra être potentiellement supérieure à la nôtre. Et peut-être vouloir notre mort. De la même manière, quand des personnalités comme Stephen Hawking s’interrogent sur la mise en service de robots configurés pour tuer des êtres humains, il s’agit avant tout de mettre des règles sur cette cohabitation inéluctable et d’empêcher toute dérive. On sait que les fameuses lois d’Asimov n’y suffiront pas. Déjà, dans des usines au Japon, des ouvriers apprennent à vivre avec leurs collègues robots. On leur a donné au maximum une allure humaine et tous vont jusqu’à faire de la gym ensemble, chaque matin. En Allemagne, des maisons de retraite se servent d’humanoïdes pour tenir compagnie à leurs pensionnaires et les aider dans leur quotidien. Tout ceci n’est qu’expérimentation. Il nous revient aujourd’hui de penser le cadre dans lequel nous allons évoluer demain. Ce ne peut être qu’un travail en commun entre les politiques, les institutions et les scientifiques, qui jouent parfois aux apprentis sorciers dans leur coin.