«L'électricité a pris une part très importante dans notre société», constate Damien Siess, directeur adjoint du service production et énergie durable à l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe). Au-delà de l'évidence, la façon dont elle pèsesur notre quotidien mérite une explication à l'heure où son tarif augmente de 2,5 % en moyenne ce samedi.
En plus de quarante ans, le modèle énergétique français a profondément muté, passant du tout énergies fossiles au tout électrique en à peine une génération. La production et la consommation ont explosé, s’adaptant à nos nouveaux modes de vie, comme le montre le bilan publié fin juillet par le ministère de l’Ecologie, du Développement durable et de l’Energie.
Choc. Retraçant son évolution depuis 1973, le bilan de la France en 2014 (1) montre que la part d'énergie primaire (nucléaire, hydraulique, photovoltaïque, éolien) dans la production d'électricité est passée de 18 % en 1973 à 87 % en 2014. Et que, côté consommation, elle a doucement rattrapé puis dépassé le pétrole, encore ultramajoritaire dans les moteurs de nos véhicules, s'imposant comme la principale forme d'énergie engloutie (de 4 % à 45 %).
Rien que pour l'électricité, on s'aperçoit que sa production a triplé en quarante et un ans, passant de 182 térawattheure (TWh) en 1973 à 563 TWh l'année dernière. Cette croissance phénoménale s'explique surtout par l'intensification de la construction de centrales nucléaires, décidée au lendemain du premier choc pétrolier, en 1973. «En installant tous ces réacteurs, on a cherché à diminuer notre consommation de produits pétroliers», rappelle Damien Siess. Radiateurs et ballons d'eau chaude électriques ont doucement pris le relais des systèmes au fioul et au charbon, par ailleurs polluants.
«Facteurs». Sans surprise, l'historique de la consommation d'électricité fait apparaître une progression soutenue du secteur résidentiel et tertiaire à partir des années 70, alors que les autres - industrie, transports et agriculture - n'augmentent que faiblement. «D'autres facteurs entrent en ligne de compte, comme l'augmentation de la population et l'explosion du taux d'équipement en appareils électroménagers. Quasiment tout le monde a un frigo et un lave-linge aujourd'hui», ajoute le spécialiste.
Une étude publiée en mai par l'agence Enerdata met cependant en évidence le retard pris par la France en termes de performance énergétique de ses bâtiments. Des seize pays européens comparés, c'est là qu'on consomme le plus d'énergie par mètre carré pour se chauffer. Plus qu'en Finlande et en Suède… «Une fois les radiateurs électriques installés, il n'y a pas vraiment eu d'incitation à consommer mieux», remarque Siess. Mais les membres de l'UE se sont engagés à réduire leur consommation d'énergie de 20 % d'ici à 2020 par rapport au niveau de 1990. L'heure de la diète a sonné.