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Libération
EDITORIAL

Vive le socialisme

Publié le 10/09/2015 à 20h51

Incroyable mais vrai : une réforme de gauche qui marche ! On est tellement tympanisé par le flonflon anti-Etat qui occupe le fond sonore de nos démocraties qu’on finit par douter de la pertinence de la régulation. A coups de grosse caisse et de sirènes d’alarme, on nous avait promis le pire si la puissance publique se mêlait de limiter des loyers de centre-ville, dont une bonne partie atteignait des niveaux indécents. Fuite des propriétaires, retrait du marché, disparition des transactions : les dispositions nouvelles prévues par la loi Alur de Cécile Duflot devaient mener à la catastrophe. Pourtant, cette loi, assouplie au fil des débats, avait uniquement pour but, non de martyriser les propriétaires, mais de proscrire les abus les plus criants, qui voyaient des bailleurs sans scrupule louer des placards au prix des palaces et chassaient inexorablement les classes moyennes du centre des villes, sans parler des classes populaires, de facto interdites intra-muros. La loi est entrée en vigueur début août à Paris. Que s’est-il passé ? Rien. La ville est toujours debout et nul cas de suicide n’a été déploré chez les propriétaires. Seul effet notable : la proportion des loyers hors normes a diminué sensiblement, ce qui était le but recherché, sans que le nombre des transactions en souffre aucunement. Jusqu’à preuve du contraire, le marché fonctionne toujours ; il est mieux régulé. Vive le socialisme ! Reste bien sûr le fond de l’affaire : la construction, handicapée par la croissance molle et par certaines règles d’urbanisme excessives. Sans une relance, le déséquilibre fondamental perdurera. Tel est le vrai défi.