«Aucune décision n'est prise à ce stade. Nous verrons après la décision du Conseil constitutionnel.» Contacté par Libération, Grégoire Kopp, porte-parole d'Uber France, dément formellement l'information de RTL selon laquelle sa société aurait renoncé à relancer UberPop. Le 3 juillet, à l'issue d'un mouvement d'une semaine de contestation des taxis, Thibaud Simphal, directeur général d'Uber France, annonçait la suspension du service controversé de transport rémunéré entre particuliers dans l'attente de la décision du Conseil constitutionnel concernant la loi Thévenoud du loi du 1er octobre 2014. Une décision prise «pour préserver la sécurité des chauffeurs Uber (…) victimes d'actes de violence ces derniers jours» et «dans le souhait de nous situer dans un esprit d'apaisement, de dialogue avec les pouvoirs publics et montrer que l'on prend nos responsabilités».
Ce mardi matin, les Sages de la rue Montpensier ont écouté les arguments de la société Uber, par la voix de son conseil Hugues Calvet, selon laquelle l'article L3124-13 du Code des transports créé par la loi n'est pas conforme à la Constitution française. La contestation de l'avocat porte sur le flou entourant le terme de «prestations de transport à titre onéreux» exprimé dans la loi Thévenoud. Flou qui, selon maître Hugues Calvet, «porte une atteinte disproportionnée à la liberté d'entreprendre». Pour l'avocat d'Uber, qui présente UberPop comme du covoiturage urbain, «l'ensemble du secteur du partage dans le domaine automobile tombe sous le coup de cette disposition».
En réponse, Me Françoise Thouin-Palat, avocate de l'Union nationale des taxis (UNT), a estimé qu'UberPop est «du taxi illégal». «Uber continue manifestement sa course effrénée et ne veut pas le reconnaître. Le covoiturage n'a rien à voir là-dedans, a-t-elle défendu. Ce n'est pas un système lucratif». De son côté, Me Xavier Pottier, défenseur de l'Etat, a demandé au Conseil constitutionnel de déclarer l'article de la loi Thévenoud conforme à la Constitution. En soulignant que les critiques formulées par Uber «sont infondées» et que le covoiturage n'est pas concerné par ces dispositions, car il est soumis «à une réglementation particulière».
Précédemment, la cour d’appel de Paris puis la Cour de cassation avaient refusé de se prononcer, laissant aux gardiens de la Constitution le soin de statuer sur ces questions prioritaires de constitutionnalité. Ces derniers rendront leur décision le 23 septembre.
Dans cette attente, Uber n'a donc pas encore décidé sa position concernant le service UberPop. «Nous sommes dans une posture de responsabilité, avance prudemment - et habilement - Grégoire Kopp. Si nous l'emportons, nous aviserons.» Sous-entendu, Uber ne désire pas à tout prix relancer le conflit avec les taxis et devrait attendre de s'entretenir avec les pouvoirs publics et le législateur avant de décider le cas échéant de relancer son service controversé. Ou au contraire d'y renoncer par crainte d'écorner son image d'entrepreneur «responsable» avant l'audience au tribunal de grande instance de Paris des dirigeants d'Uber France et Uber Europe.
Ces derniers comparaîtront en correctionnelle le 30 septembre pour «pratique commerciale trompeuse», «complicité d'exercice illégal de la profession de taxi» et «traitement de données informatiques illégal».