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Libération
Billet

Peut-on défendre... Vincent Bolloré ?

Parce que même les gens qui ont mauvaise réputation ont droit à un avocat, on a cherché des arguments pour défendre le président du conseil de surveillance du groupe audiovisuel, qui sera entendu jeudi sur sa stratégie concernant Canal+ et i-Télé.
Vincent Bolloré. (Photo Patrick Kovarik. AFP)
publié le 22 septembre 2015 à 10h41

Quand Vincent Bolloré a commencé de s'attaquer aux Guignols début juillet, on s'est dit que ce ne serait pas plus mal pour les marionnettes, qu'on trouvait un peu dépassées, de se remettre en question et de se réinventer.

Quand il a viré Ara Aprikian, le patron de D8, malgré ses bons résultats, ça sentait le règlement de comptes et on a imaginé qu’il y a des choses qu’on ne savait pas.

Quand il a changé la production historique du Grand Journal, on a bien eu l'impression de perdre une émission avec laquelle on avait nos petites habitudes, mais que rien n'était irremplaçable.

Quand il a imposé Maïtena Biraben à la présentation de ce nouvel «access prime time», on a senti que c'était à double tranchant pour elle mais comme on l'aimait bien dans le Supplément on a pensé qu'on n'y perdrait pas au change.

Quand il a remplacé toutes les équipes dirigeantes pour placer des hommes (et très peu de femmes) de confiance, on a trouvé que cette prime à la loyauté avant celle aux compétences comportait des risques et, pour autant, ce n’était pas une surprise venant de l’homme d’affaires breton habitué à ce management à l’affect.

Quand on a vu les petites premières audiences du Grand Journal, on a préféré laisser l'émission s'installer dans la durée, car on ne fait pas un nouveau programme radicalement différent en deux mois, un peu d'indulgence que diable.

Quand il a mis le nez dans les sketchs de différentes émissions qui avaient osé faire des clins d'œil appuyés à sa politique de reprise en main pour le moins volontariste, on a jugé qu'il avait quand même d'autres chats à fouetter et bien peu d'humour.

Quand il a exécuté les directrices de la rédaction d'i-Télé, on ne l'a pas vu venir et on a trouvé ça un peu injuste.

Quand on a fait le compte des documentaires qu'il a voulu censurer depuis l'été, on a été forcément gêné par cet interventionnisme peu en rapport avec ce qu'on appelle la déontologie.

Quand on a appris lundi que la direction de Canal + avait appelé furibarde France Inter après un billet d'humeur de Charline Vanhoenacker, et que cette même Charline Vanhoenacker ne pourrait pas travailler sur la nouvelle émission d'Antoine de Caunes suite à ce «faux pas», on s'est dit qu'on marchait sur la tête.

Et quand on a relu la liste de tous ces événements survenus depuis un peu plus de deux mois, on ne peut s’empêcher de penser que Vincent Bolloré est en train de se tirer une balle dans le pied. Mais comme il est totalement imperméable aux critiques qu’il suscite, on se doute que cette liste n’a pas fini de s’allonger.

Alors peut-on défendre Vincent Bolloré ? Oui, seulement si on considère l’entêtement comme une vertu.