On l’imagine mal au volant d’une Passat ou d’une Golf… Mathias Müller, 62 ans, regard bleu acier, sourire carnassier, adepte des marches en montagne et des soirées entre copains, grand, mince et sportif, ne se pliera pas à la tradition du veston double rang en vogue à Wolfsbourg (Nord). Lui n’hésite pas à présenter les dernières nouveautés de Porsche en col roulé.
Bilan exemplaire
Dauphin, lui aussi – comme Martin Winterkorn à qui il doit succéder –, du patriarche Ferdinand Piëch, qui continue de tirer les ficelles dans l’ombre en tant que gros actionnaire du groupe, Matthias Müller a passé toute sa vie au sein du géant allemand de l'automobile qui comptabilise aujourd'hui douze marques. Né en 1953 à Chemnitz en Saxe, dans l'ex-RDA, sa famille a très tôt émigré vers à l'Ouest. Son parcours est classique, à l’allemande : une formation d’outilleur chez Audi suivie d’études d’informaticien à Munich, puis retour chez Audi, en 1978, où il enchaîne les postes à responsabilités au sein de la marque alors dirigée par Martin Winterkorn, mais aussi chez Seat, Lamborghini ou Volkswagen.
En 2010, Ferdinand Piëch le nomme à la tête de Porsche avec une mission délicate : obtenir du fabriquant de bolides qu’il abandonne toute résistance contre le plan du «Vieux», l’intégration de Porsche au Konzern. «Mission accomplie, souligne le magazine der Spiegel. Sans se faire d’ennemis en interne !» Le bilan de Matthias Müller à la tête de Porsche est exemplaire. Rien qu’au cours du premier semestre 2015, les ventes on progressé de 29,8%, à 113 984 véhicules. Porsche séduit aussi par ses innovations, comme avec la présentation, lors du dernier Salon automobile de Francfort, d’une voiture de sport électrique à l’autonomie de 500 km au lieu des 150 promis par la concurrence. Il dispose également de la confiance des salariés, un atout indispensable au regard de la culture interne de Volkswagen. Le président du Comité d’entreprise de VW, et à ce titre membre influent du conseil de surveillance, Bernd Osterloh, apprécie sa «haute compétence sociale». Très sûr de lui mais pas arrogant d'après ses proches, il passe bien auprès des ouvriers.
«Risque»
Membre depuis 2007 du directoire du groupe, la structure qui chapeaute les différentes marques, Matthias Müller présente enfin l’avantage d’avoir été associé aux restructurations à venir, qui prévoient le regroupement des douze marques en quatre entités distinctes, afin de briser l’excès de centralisation dont Volkswagen souffrirait aux yeux des analystes. «Le choix de Müller n’est pas entièrement dépourvu de risque», estime pourtant le Spiegel, rappelant que le premier véhicule connu doté d’un logiciel de manipulation des émissions toxiques, une Jetta commercialisée aux USA est arrivée sur le marché en 2009. A l’époque où le modèle a été développé, Matthias Müller était le responsable de la stratégie du groupe à Wolfsbourg.
Récemment, ce pur produit Volkswagen s'était engagé dans le débat sur les réfugiés. Dans un entretien au Süddeutsche Zeitung, il invitait les managers allemands à prendre position contre l'extrémisme.