Qui savait quoi et depuis quand ? Depuis le début de l'affaire, les organes de contrôle internes à Volkswagen fouillent dans les vieux dossiers, à la recherche d’explications sur le scandale des moteurs diesel truqués qui a déjà coûté son poste au grand patron de Volkswagen Martin Winterkorn, remplacé vendredi par Matthias Müller. Et on en apprend tous les jours. Ce week-end, la presse allemande a ainsi révélé que l’équipementier Bosch aurait fourni dès 2007 à Volkswagen le logiciel permettant de truquer les émissions polluantes de ses véhicules diesel «à des fins de test». Mais le fournisseur avait pris soin de prévenir son client par écrit que l'installation de ce logiciel sur des voitures série serait totalement «illégale». «Visiblement, on avait connaissance de manipulations des émissions jusque dans les cercles élevés du management, depuis 2007», affirme l’édition dominicale du Bild Zeitung. Bosch rejette toute responsabilité dans cette affaire, rappelant que «dans le cadre de nos relations commerciales avec Volkswagen, nous sommes tenus à la confidentialité… La responsabilité de développer et d’intégrer les composants fournis repose sur VW.»
Et il y a eu d'autres mises en garde de Bosch. Selon l'édition dominicale du Frankfurter Allgemeine Zeitung cette fois, un technicien du constructeur allemand aurait alerté ses supérieurs en 2011 de ces pratiques illégales. Ce document écrit de 2011 aurait été présenté vendredi aux membres du Conseil de Surveillance, sans que personne ne puisse s'expliquer pourquoi ces alertes répétées sont restées sans effet. Le dernier signal d'alarme connu remonte à mai 2014, lorsque les autorités environnementales américaines ont commencé à se pencher sur les modèles diesel du groupe. Sans que VW ne modifie en rien ses pratiques, ce qui plonge les observateurs allemands dans la plus grande perplexité.
Sous pression maximale, le géant mondial de l'automobile s'apprête à faire appel à un cabinet américain d'audit externe, notamment pour déterminer une éventuelle responsabilité personnelle de plusieurs membres du directoire. Les cadres de la direction qui auraient agi de façon délibérée risquent des poursuites à titre personnel et des demandes de dédommagement du groupe, selon le quotidien Frankfurter Allgemeine Zeitung. Le PDG partant, Martin Winterkorn, qui a endossé la responsabilité du scandale tout en assurant ne rien savoir de l'affaire, réclamerait toujours de son côté le parachute doré de 28 millions d'euros que lui assurait son contrat. Il réclamerait en outre ses salaires jusqu'en 2016 et des primes de départ... Mais il n'est pas encore assuré de toucher cet argent, vu l'ampleur de la polémique outre-Rhin.
Longtemps restées silencieuses, les autorités allemandes exigent désormais de Volkswagen un calendrier pour mettre tous les véhicules concernés par la tromperie aux normes anti-pollution. Le KBA, l’autorité fédérale des transports, a demandé au constructeur «des mesures contraignantes et un calendrier» d’ici le 7 octobre expliquant comment le groupe entend mettre ses véhicules aux normes d’émissions polluantes sans logiciels faussant les résultats, selon le Bild. Sans quoi le KBA pourrait retirer son agrément à tous les véhicules concernés. Les automobilistes ne pourraient alors plus utiliser leur véhicule s’il est concerné par le scandale, ce qui laisse augurer de sommes colossales en dommages et intérêts puisque rien qu’en Allemagne, près de 3 millions de véhicules seraient concernés ; et il y en a 11 millions à travers le monde.
Le quotidien Die Welt doute toutefois de la détermination de Berlin, et parle même de «complot du diesel», assurant que le gouvernement allemand tente en parallèle de repousser l’introduction d’un nouveau test fiable par l’Union européenne de fin 2017 à 2021.