Le tout-puissant syndicat allemand de la métallurgie IG Metall (2,3 millions de membres) vient d’élire mardi sa nouvelle direction. Comme le veut la tradition, c’est le numéro 2 qui a été élu. Jörg Hofmann, 59 ans, grosses lunettes et presqu’un air de professeur Tournesol succède à Detlev Wetzel.
.Pour la première fois dans l’histoire du syndicat, une femme, Christiane Benner, le remplace à son poste. Spécialiste des négociations tarifaires à la carrière atypique, Jörg Hofmann donnera à la centrale une nouvelle impulsion, en direction des femmes, des salariés d’origine étrangère et des jeunes. Il hérite d’une centrale en grande forme, aux caisses bien remplies, capable de s’imposer face au patronat et de se faire entendre dans le conflit VW.
Jörg Hofmann n’a quasiment jamais quitté son Bade-Wurtemberg natal. Sa carrière au sein d’IG Metall est atypique. Ses prédécesseurs ont tous suivi une formation en alternance d’ajusteur-mécanicien ou d’outilleur. Lui se destinait à l’agriculture, avant d’opter pour des études d’économie. Le jeune Hofmann envisage une carrière de chercheur. Et opte finalement pour le syndicalisme : «Je voulais faire bouger les choses avec mon travail», expliquera-t-il plus tard. Il débute sa carrière de fonctionnaire syndical à Stuttgart, chez IG Metall en 1987. Le Bade-Wurtemberg, la puissance de son industrie automobile avec Daimler, Audi, Porsche et Bosch… Le contexte est favorable à une solide carrière.
Son nom figure dans nombre de conventions collectives, comme celle de 2001, par laquelle le patronat s’engage à davantage de formation professionnelle ; ou celle de 2004 qui autorise une plus grande flexibilité du travail. Ses thèmes de prédilection sont l’innovation, la formation professionnelle, la conciliation de vies privée et professionnelle et la flexibilité du temps de travail. En 2003, Jörg Hofmann prend la tête de la section sud-ouest d’IG-Metall, l’une des plus grosses du pays avec 420 000 membres. Au pays de la cogestion, il est également membre des conseils de surveillance de Daimler et de Bosch.
«Avec Jörg Hofmann, on s’attend à un changement de style, explique le patron de la fédération patronale de la métallurgie Gesamtmetall, Oliver Zander. Il va essayer d’amener de nouveaux thèmes sur la table, comme la digitalisation de l’industrie.» Volkswagen peut déjà s’attendre à affronter un opposant intraitable sur les conséquences du scandale aux diesels truqués. Le nouveau patron du constructeur, Matthias Müller, envisage de réduire les contrats d’intérimaires pour faire face à la crise dans une interview au Bild Zeitung ? Jörg Hofmann rétorque aussitôt par voie de presse : «Les salariés de VW et de ses fournisseurs n’ont aucune responsabilité dans ce scandale.» A plusieurs reprises dans le passé, il s’en était pris à ces entreprises qui «courent derrière Toyota mais en tirent les mauvaises conséquences, en délégant toujours plus aux fournisseurs là où Toyota reprend de plus en plus de choses en mains propres».
Dans le bras de fer qui l’opposera au constructeur de Wolfsburg, Jörg Hofmann disposera d’atouts de taille : IG Metall est de nouveau en croissance et gagne de nouveaux membres depuis quatre ans. De quoi faire face à de durs conflits sociaux.